Extrait et traduit de « The Genius of Homoeopathy and Essays on Homoeopathic Philosophy » de Stuart Close. Traduction Charles Tocanier.
Source : https://homeopathybooks.in/genius-of-homoeopathy/schools-of-philosophy/

Les différentes écoles de pensée…

Nous allons discuter des écoles de philosophie comme le matérialisme, l’idéalisme et le substantialisme comparées à l’approche et au point de vue d’Hahnemann….

 Il sera bon de jeter un coup d’œil aux différentes écoles de philosophie afin de pouvoir comprendre son point de vue et d’identifier les idées et concepts fondamentaux à partir desquels Hahnemann a développé son système.

Ces différentes écoles de philosophie peuvent être classées en trois grandes catégories : matérialiste, idéaliste et substantialiste.

Le matérialisme…

« Doctrine selon laquelle les faits de l’expérience doivent tous être expliqués par référence à la réalité, aux activités et aux lois de la substance physique ou matérielle. En psychologie, cette doctrine nie la réalité de l’âme en tant qu’être psychique ; en cosmologie, elle nie la nécessité d’assumer l’être de Dieu en tant qu’Esprit Absolu ou tout autre motif spirituel ou principe premier ; opposé au spiritisme. Les théories matérialistes ont varié depuis leur origine, mais la plus largement acceptée considère toutes les sortes de sentiments et de vie mentale comme des  » productions de l’organisme, et l’univers lui-même comme pouvant être résolu en termes d’éléments physiques et de leurs mouvements ». (Dictionnaire standard.)

Il convient ici de réfléchir un instant à la signification des mots « réalité » et « substance ». Le matérialiste bon teint considère comme non-réel et non-substantiel tout ce qui n’a pas de tangibilité. Il réduit tout aux termes de la matérialité physique, qui est pour lui la seule réalité. S’il utilise les mots, énergie, puissance, force, mouvement, principe, loi, vie de l’esprit, qui représentent des choses intangibles, c’est pour les considérer simplement comme des attributs, des conditions ou des produits de la matière. Pour lui, les représentations ne sont ni réelles ni substantielles. Elles n’existent, pour ainsi dire, que dans l’imagination. Du fait qu’elles ne sont pas tangibles, elles ne sont pas réelles. N’étant pas réelles, selon la façon de voir matérialiste, elles ne sont pas substantielles et ne méritent donc pas d’être envisagées. Le fait qu’il soit contraint d’agir comme si ces faits étaient réels ne fait aucune différence dans l’attitude intellectuelle du matérialiste. Il refuse d’admettre leur existence autrement que comme résultant des propriétés de la matière.

Le défaut de cette philosophie est qu’elle semble induire et favoriser un état d’esprit particulièrement frustrant, sceptique, conflictuel et non-scientifique à l’égard de beaucoup de phénomènes. Nous parlons de ces phénomènes que d’autres ressentent et dont ils savent, dans leur plus grande conscience, qu’ils sont très réels – et qui sont la source et la substance de convictions profondes, d’aspirations élevées et de conceptions éclairées. Cette attitude peut devenir et devient souvent blessante à l’extrême, en grande partie parce qu’elle est tendancieuse et parce que ceux qui la défendent refusent obstinément de nommer les choses par leur nom. Pour l’esprit plus ouvert et plus axé sur la  philosophie, l’énergie intangible et invisible, le principe de force, la loi ou l’intelligence sont aussi réels et aussi substantiels que les choses matérielles qui en résultent et devraient être ainsi désignés en toute liberté et sincérité.

L’idéalisme…

« C’est un système de pensée réflexive qui interpréterait et expliquerait l’univers entier, les phénomènes, les pensées et leurs relations, comme la réalisation d’un système d’idées. Il prend différentes formes selon la vision que l’on a de cette idée ou de l’idéal, mais aussi de la manière dont nous en prenons connaissance. »

Le substantialisme…

Doctrine selon laquelle les existences substantielles ou les êtres réels sont à la source ou au fondement de tous les phénomènes, mentaux et physiques ; cette doctrine nie en particulier le fait que la conception de la substance matérielle puisse être réduite à de simples champs de force.

L’idée fondamentale du Substantialisme est ancienne, mais son approfondissement et son application systémique sont modernes.

 « La pensée prédominante du substantialisme est que toutes les choses dans la Nature qui existent ou peuvent former la base d’un concept sont réellement des ensembles substantiels, qu’il s’agisse des prétendus principes ou forces de la nature ou des atomes des corps physiques, y compris s’étendant à la vie et aux pouvoirs mentaux de tout organisme sensible, du plus puissant au plus faible. » (Hall.)

Il soutient, par exemple, que la « théorie des ondes » acoustique est une erreur scientifique. Hall a établi expérimentalement le fait que:

  • « Le son est constitué d’émissions corpusculaires et est donc une entité substantielle, au même titre que l’air ou l’odeur ».
  • Et il affirme que : – « Si l’on peut prouver que le son est une substance, il ne peut y avoir l’ombre d’une objection scientifique soulevée contre la nature substantielle ou entière de la vie et des pouvoirs mentaux ». De ce point de vue, l’esprit est aussi réel dans son essence que le cerveau, qui est considéré comme la manifestation tangible de la forme et de la substance de sa contrepartie invisible.

« Si l’esprit est le résultat du mouvement des molécules dans le cerveau, en quoi consiste ce résultat ? Si l’esprit se résume à des phénomènes moléculaires, alors l’esprit n’est rien, une non-entité, puisque le mouvement lui-même est une non-entité ». (Hall.)

Rien ne peut naître de rien. Tout effet provient d’une cause. Les effets suivent les causes dans une succession ininterrompue.

 Aucun effet substantiel ne peut être produit sur un sujet quelconque sans qu’une substance absolue quelle qu’elle soit ne rattache une cause à un effet.

La gravité, ou ce qui produit la gravitation, est une substance, puisqu’elle agit sur des objets physiques à distance et provoque des effets physiques substantiels.

 Le magnétisme est une substance, puisqu’il passe à travers des corps importants, saisit et déplace le fer.

 Le son est une substance, puisqu’il est véhiculé dans l’espace par les ondes aériennes. Il doit être substantiel, sinon il ne pourrait pas être transmis.

La lumière, la chaleur et (ou) l’électricité sont substantielles (Elles peuvent être identiques.) Il est absurde de les appeler « systèmes cinétiques » ou « phénomènes vibratoires », Le mouvement est une non-entité, le simple fait qu’une chose change de position dans l’espace. Le mouvement n’est rien avant que l’objet ne commence à bouger, et rien après qu’il ait cessé de se déplacer. La science moderne enseigne que la lumière et la chaleur sont des mouvements ou des vibrations de l’espace.

Substantialisme et enseignement de la physique…

La science physique enseigne donc tacitement que l’espace est substantiel ; elle l’a mesuré ; elle a calculé son coefficient d’inertie et son énergie cinétique ; elle l’a défini comme étant la substance primaire dont se composent la matière, la chaleur, la lumière et l’électricité. Si la science a raison dans cette théorie, alors la lumière, la chaleur et l’électricité sont des émanations substantielles de leurs corps ou substances de production ; en d’autres termes, elles sont chacune composées d’espace, avec des variations dans leur taux de vibration. Mais la science physique (et donc le matérialisme) ne nous dit pas qui ou quoi fait bouger l’espace et détermine ce taux de vibration. Cela reste du domaine du substantialisme, d’enseigner que la Vie est une substance ayant les qualités d’un véritable être entier. Par sa seule action, des entités organisées, vivantes, conscientes, pensantes et volontaires sont créées, maintenues et reproduites. Ainsi, la Vie est intelligente, sinon elle ne pourrait pas manifester ces qualités.

L’esprit est une substance, puisqu’il agit pour penser ou produire des pensées et des objets. L’esprit a donc une intelligence. La pensée – esprit agissant – peut ainsi être appelée « mode de fonctionnement de l’esprit, agissant sur la chimie du cerveau ». En dernière analyse la vie et l’esprit ne font qu’un, puisqu’ils ont des qualités et des attributs identiques, et l’esprit (Syn : vie, Esprit) est la cause première du mouvement. La vie est une énergie, et toute énergie est une énergie vivante.

Le substantialisme et les êtres vivants…

En ce qui concerne les êtres vivants, y compris l’homme, l’hypothèse substantialiste est la suivante :

« à l’intérieur de chaque créature vivante existe un ensemble vital et mental, la contrepartie (invisible) de la structure physique, la source de tous les phénomènes vitaux et physiologiques, originellement apportés par une Volonté Créatrice (Esprit-Mental-Vie).  Ces atomes constituant l’être, doivent, à la dissolution de la vie organique, retourner à la source vitale et spirituelle d’où ils ont émané, pour s’y mêler par réabsorption dans la source originelle – comme dans le cas de ces vies (humaines) qui ont reçu l’empreinte spirituelle de l’image de Dieu, vivant pour toujours avec le moi conscient hérité de leur organisme supérieur». (Hall.)

La position de Hahnemann…

Hahnemann avait jusqu’à présent été classé parmi les idéalistes. Pour être plus précis, il a été appelé « Vitaliste », en référence à l’importance accordée dans l’Organon à la notion de vie et de force vitale.

Avant l’apparition du substantialisme comme philosophie formulée, qualifier la pensée philosophique hahnemannienne « d’idéaliste » pouvait sembler pertinent. Mais puisqu’une philosophie substantialiste a été désormais clairement établie, il ne fait aucun doute qu’il est dès-lors approprié de l’y rattacher. Sa position et ses déclarations concernant la Déité, la vie, l’esprit, la force vitale, la matière, la potentialisation (ou la dynamisation), les infinitésimaux, et l’accent mis sur le caractère substantiel de ces grandes réalités (pour lui) ne s’accordent à aucune autre classification. Hahnemann reconnaît franchement et avec respect l’Être suprême, comme doit le faire tout homme scientifique qui réfléchit logiquement jusqu’au bout. Sinon, toute pensée se termine par la négation.

Une démarche expérimentale…

L’appel constant d’Hahnemann à l’expérience, aux faits d’observation et d’expérimentation, et à la nécessité en médecine d’éviter toute spéculation de quelque nature que ce soit, établit le caractère pratique et bien équilibré de son raisonnement. Il refuse de spéculer sur la nature essentielle des choses. Il a observé et accepté les données de la vie telles qu’il les voyait. Pour lui, esprit et matière, force et mouvement, esprit et corps, santé et maladie, dans toutes leurs mutations et modifications, coexistent en tant que faits d’observation, de conscience et d’expérience. Il lui incombait dès-lors de les utiliser de manière logique et pratique.

Hahnemann n’était pas un matérialiste qui réfutait l’origine et l’existence divine de la substance ou des choses de l’esprit ; il ne soutenait pas l’idée que les phénomènes de l’esprit ou mentaux ne sont que le résultat d’une organisation spécifique de la matière. Ce n’était pas non plus un idéaliste au sens strict du terme qui croyait, comme c’était le cas de l’évêque Berkeley (et de Mrs. Eddy), que tout ce qui existe est esprit, et que ce que l’on appelle matière, ou monde extérieur, est soit une succession de concepts transmis par l’esprit de la Déité, soit une illusion ou une « erreur », voire encore la simple production de l’esprit lui-même ainsi que l’enseignait Fichte.

La philosophie de Lord Bacon…

Les écrits de Hahnemann témoignent de sa familiarité avec les travaux et les enseignements des philosophes ; mais il semble avoir été surtout influencé par la philosophie inductive de Lord Bacon. Il ne l’a jamais mentionné ni cité dans ses écrits. Mais, dans le développement de l’homéopathie d’Hahnemann,  on trouvera peu d’exemples plus fins de l’application du principe de Bacon dans l’étude des phénomènes naturels.

Lord Bacon : « réformer la science physique» …

Bacon s’était fixé comme tâche particulière d’étudier et de réformer complètement la science physique ; mais son intention couvrait tout le champ de la philosophie, et son principe était applicable au psychisme et à la morale, tout autant qu’à la science physique. Ce principe était l’induction logique, sur laquelle était basée la méthode inductive d’observation et d’expérience. C’est la seule base valable des découvertes et c’est la base admise de la science moderne.

« (Le) mérite (de Bacon) en tant que philosophe réside principalement dans le fait d’avoir fait revenir l’esprit humain de la mauvaise direction dans laquelle il avait si longtemps cherché la connaissance, et de l’avoir mis sur une nouvelle voie d’investigation », dit un écrivain.

Des grands chemins abandonnés…

« Lorsque Bacon a analysé la philosophie des anciens, il l’a trouvée spéculative. Les grands chemins de la vie avaient été abandonnés. La nature, étendue à l’intelligence de l’homme, n’avait guère été intérrogée par les philosophes de l’Antiquité. Ils avaient regardé à l’intérieur et non à l’extérieur. Ils avaient cherché à élaborer des systèmes sur les bases incertaines de l’hypothèse et de la spéculation humaines au lieu de les faire reposer sur les lois immuables de la Providence telles qu’elles se manifestent dans le monde matériel. Bacon a brisé les barreaux de cette prison mentale : « Libérez l’esprit et étudiez la nature » ». (Davies, Logique des mathématiques.)

La renommée de Bacon repose principalement sur son « Novum Organum », qui représente la deuxième partie de son « Instauratio Magna ». L’objectif était de fournir au monde un meilleur modèle de recherche de la vérité, c’est-à-dire une meilleure logique que la méthode dite aristotélicienne ou syllogistique. Il en appelait à une logique dont le but ne devrait pas être de fournir des arguments pour la polémique, mais de faire des recherches sur la nature, et d’arriver à la vérité par l’observation et l’induction complète des faits.

Il est tout-à-fait significatif que Hahnemann, en cherchant un nom pour son ouvrage magistral, ait choisi celui  « d’Organon », utilisé par Bacon, et avant lui par Aristote, dont la méthode philosophique, déformée et mal appliquée par les étudiants du Moyen-Âge, a permis à Bacon de retrouver sa vraie place tout en l’améliorant.

Dr Stuart CLOSE

Le Dr Close est né le 24 novembre 1860 et en vint à étudier l’homéopathie après la mort de son père en 1879. Sa mère s’était remariée avec un médecin homéopathe qui avait fait évoluer les goûts pour le droit de Close vers la médecine.

Son beau-père l’aide à étudier l’Organon et il fait ses études de médecine en Californie pendant deux ans. Il termine ses études au New York Homeopathic College et obtient son diplôme en 1885. Il termine sa formation homéopathique. Elève de B. Fincke et de P. P. Wells. S’installant à Brooklyn, le Dr Close fonde en 1897 l’Union homéopathique de Brooklyn. Ce groupe se consacre à l’étude de l’homéopathie hahnemannienne pure.

En 1905, le Dr Close est élu président de l’Association internationale hahnemannienne. Il a également été le rédacteur en chef du département de philosophie homéopathique pour « l’homéopathie ». Le Dr Close a enseigné la philosophie homéopathique au New York Homeopathic Medical College de 1909 à 1913.

Les conférences du Dr Close à New York Homeopathic ont d’abord été publiées dans le Homeopathic Recorder et ont ensuite constitué la base de son chef-d’œuvre sur la philosophie homéopathique :

« The Genius of Homeopathy ».

La bibliothèque homéopathique du Dr Close était réputée être l’une des meilleures du pays. Il était un musicien accompli ainsi qu’un généalogiste passionné. (source : http://www.wholehealthnow.com/bios/stuart-close.html)

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